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Visa le noir, tua le blanc

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Chronique de Chantal Hébert : Visa le noir, tua le blanc

Photo : J. Boissinot / PC

Dans un article publié dans son blogue le 6 février dernier, il écrit : « Pourquoi les parents francophones ne pourraient-ils pas envoyer leurs enfants faire une partie de leurs études dans des écoles anglaises ou bilingues, de façon à ce qu’ils maîtrisent parfaitement les deux langues ? L’anglais est la langue de 350 millions de personnes autour de nous. C’est également la plus importante langue internationale partout dans le monde. La maîtriser est un atout incontournable. »

Peu de Québécois mettent en doute la deuxième moitié de l’énoncé du député de Beauce. La vaste majorité des parents souhaitent que leurs enfants maîtrisent l’anglais. Et beaucoup jugent que la qualité actuelle de l’enseignement de l’anglais laisse à désirer.

Mais ce n’est pas parce qu’il ne croit pas que la loi 101 ait des mérites que le ministre Christian Paradis a installé sa famille à Ottawa et inscrit ses enfants à des classes en anglais, mais plutôt parce que, dans bien des régions du Québec, l’enseignement de la langue seconde n’est pas adéquat.

Dans les faits, l’équation que fait Maxime Bernier entre loi 101 et apprentissage de l’autre langue officielle est bancale. D’ailleurs, le mal qu’il diagnostique n’est pas québécois, mais plutôt pancanadien.

Au Canada, le droit de choisir d’étudier dans une langue officielle autre que sa langue maternelle n’est absolu nulle part, et le concept du libre choix est surtout théorique.

Chaque année, des cen­taines de parents anglophones se disputent ainsi un nombre limité de places dans les classes d’immersion en français. L’an dernier, des parents de la région de York, en banlieue de Toronto, ont passé une partie de la nuit devant leur école de quartier pour assurer une place en immersion à leurs enfants. En début de matinée, la liste des inscriptions était déjà complète.

Même situation en Colombie-Britannique, où le ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles, James Moore, raconte que le tour de force logistique pour inscrire ses quatre nièces en immersion a nécessité une véritable mobilisation familiale.

Depuis 30 ans, les provinces canadiennes se sont pourtant toutes dotées de réseaux scolaires de langue française. Celui de l’Ontario est aujourd’hui largement comparable au système dont dispose la communauté anglo-québécoise. Mais ces écoles, destinées aux minorités francophones, ne sont pas des substituts aux classes d’immer­sion, dont est friande la majorité anglophone.

Dans le reste du Canada comme au Québec, le seul vrai droit en matière de langue d’enseignement est celui d’être instruit et de faire instruire ses enfants dans la langue officielle qui correspond à sa langue maternelle.

Dans cet esprit, les écoles de langue française du reste du Canada sont, pour l’essentiel, réservées aux familles qui appartiennent à la minorité francophone. Ce n’est pas la loi 101 qui le dit, mais plutôt l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Cet article, qui n’existait pas au moment de l’adoption de la loi 101, n’impose à aucune province l’obligation de permettre le libre choix généralisé en matière de langue d’enseignement.

Dans un Québec où la loi 101 n’existerait plus, rien n’obligerait l’État à financer l’expan­sion du système scolaire de langue anglaise pour répondre aux besoins des élèves francophones ou allophones qui voudraient fréquenter les écoles destinées à la minorité anglophone.

Le ministère de l’Éducation ne se lancerait pas dans la multiplication d’écoles anglaises au Saguenay. Les enseignants qualifiés pour offrir l’immersion en anglais ne pousseraient pas dans les arbres. Comme leurs compatriotes anglo-canadiens, la grande majorité des Québécois francophones continueraient à devoir compter sur leurs propres commissions scolaires pour assurer l’enseignement de l’anglais à leurs enfants.

En parcourant les nombreux commentaires suscités par l’article de Maxime Bernier sur la loi 101, le clivage linguistique saute aux yeux. Quoi qu’en dise l’ex-ministre, sa sortie en faveur du retour au libre choix a touché une corde sensible… anglophone. La plupart de ses correspondants francophones ne voient pas de conflit entre la loi 101 et leur intérêt manifeste à maîtriser l’anglais. Cela pourrait changer si le Parti québécois mettait à exécution son projet d’étendre la loi 101 aux cégeps, fermant ainsi la voie aux étudiants allophones et francophones qui utilisent le cours collégial pour parfaire leur anglais.

 

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